Yves avait très envie d'écrire sur Sumatra.... le soucis, c'est qu' il est un peu lent au démarrage... alors, patience !
Bon ben je me lance, il me faut du temps pour écrire, je n'ai pas la plume facile et le clavier QWERTY me fout la nausée (on a d'ailleurs abandonné l'idée de faire ces maudits accents face aux manipulations fastidieuses à réaliser). Il m'arrive souvent d'écrire des couplets de rap, je ne sais pas quel est le plus difficile entre habiller une instrumentale et remplir une page noire mais je sais que dans le rap il faut du rythme et de la rime, le tout dans un temps limité. Ici je ne tiendrai rigueur que du rythme. Ce qui nous pousse à écrire dans le rap, outre la satisfaction de l'expression artistique, c’est l'absurdité des choses qui nous entourent car fort est de constater que tout ne va pas pour le mieux et que nos orientations en générale ne nous poussent pas à l'optimisme ! C'est d'ailleurs ces dérégulations qui constituent le principal moteur de notre inspiration. (J'ai essayé de raper sur de la musique traditionnelle batak au fin fond de la belle et tremblante Sumatra mais ça ne colle pas)! Ici c'est différent, on parle du voyage et à vrai dire, vous l'aurez d'ailleurs certainement constaté, tout se passe bien, y'a pas à s'plaindre comme dirait l'autre... on étale juste notre bonheur sur la toile (ce qui peut paraitre cruel). En quelque sorte on écrit un roman dans lequel nous sommes les héros, une sorte de pur ego-trip car après tout le voyage c'est nous, c'est elle, c'est moi... bref !
Je vais donc faire mon petit couplet sur Sumatra, qui constitue pour nous le vrai commencement du voyage. La Malaisie c'était plutôt les vacances entre copains et ce n'est pas avec ce club-mediste de Fab qu'on aurait pu sortir des sentiers battus (ça Fab, c'était ma petite vengeance à la suite de ton commentaire à propos de mes fautes d'ortaugraffe, ah ah). Plus sérieusement, disons que Sumatra est simplement plus dépaysante, le choc culturel est plus grand, les repères s'évanouissent. La transition est rapide. Nous avons pris l'avion pour Medan depuis KL, légèrement angoissé depuis que nous avons appris que les compagnies aériennes indonésiennes étaient toutes black-listées. En vol nous traversons une zone turbulente, les éclairs viennent caresser nos ailes, un homme à côté de nous effectue quelques gestes de tai-chi pour se calmer - la tension est palpable. Nous arrivons en pleine nuit, un rideau de pluie nous accueille. Nous ne passons qu'une seule nuit à Medan, en plein Ramadhan, à 50 mètres de l'une des 2 plus grandes mosquées d'Indonésie (le plus grand pays musulman du monde), dans une ville dont le nom signifie "champ de bataille"... autant dire que la nuit a été courte. Nous partons le matin même vers le Sud et ses lacs de montagne nés d'éruption volcanique.
L'île de Sumatra est immense, belle et sauvage. Elle vit, elle tremble pour nous (nous y avons notre lot quotidien de tremblements de terre) et nous tremblons pour elle tellement elle semble fragile. Cette île a opéré chez nous un changement dans notre manière de voyager. Au début on s'accroche à nos habitudes, on bataille dur dans nos petites têtes, on s'énerve, on ne comprend rien, on aimerait bien mettre de l'ordre dans ce foutu bordel et puis petit à petit on s'y fait, on y prend gout, on se laisse vivre.... Ah ce voyage, il m'en a fallu du temps pour que je le sente mais ca y est je suis dedans !
L'anglais devient inutile, il est bien plus pratique d'apprendre le bahasa indonésien (qui est à ce propos très semblable au malais puisque tous deux sont la variation d'une même langue, la bahasa malayu, pratiquée des le VIIe siecle dans l'archipel). On baragouine quelques mots, ça passe aisément et le contact est d'autant plus chaleureux. Le problème avec Sumatra c'est qu'il existe une multitude de peuples et autant de dialectes.
Le coût de la vie est très fluctuant, les prix varient sans cesse mais dans une fourchette qui reste relativement petite. Nous occidentaux sommes rapidement millionnaires en Indonésie, le prix d'une même denrée peut varier de plusieurs dizaines de milliers de rupiahs, il ne faut pas plus s'en inquiéter (on achète 13 000 rupiahs avec 1 euro). Tout se négocie sauf l'essence. La négociation nous pose un sérieux problème de conscience surtout quand il s'agit de quelques dizaines de centimes d'euros mais ici c'est l'affaire de tous, pas seulement des touristes. Et puis cela rend la relation commerciale plus humaine.
Le temps est obsolète, mieux vaut ne pas avoir de montre... Pour aller de Prapat à Bukkitingi, après un retard de 2 ou 3 heures au départ, le bus a du s'arrêter en pleine nuit au milieu de nulle part. Les yeux gonflés et les os malmenés nous sommes descendus, comme tout le monde. Le bus se trouvait au bas d'une montée vertigineuse sur une route ou plutôt un chemin couvert de gros rochers et de trous béants. Le bus avait du prendre un itinéraire bis étant donné que la route principale avait été détruites par un tremblement de terre une semaine précédant notre arrivée. Le bus a du être tiré par un câble, puis comme si de rien n'était nous sommes repartis. Le trajet a duré 17 heures. Les distances sont longues, Sumatra est la 4eme plus grande île du monde. On s'enivre des paysages, des palmeraies et des cocoteraies à perte de vue, des rizières en escaliers désorientés que l'homme a bâti mais que la nature a corrigé. Et ce vert -quel vert- de quoi faire frétiller mes rétines. Je ne pensais pas que la chlorophylle pouvait être en ce point aussi réconfortante et apaisante. N'en déplaise au monde cathodique, cette couleur créé une sorte de bien-être qu'il est difficile d'expliquer (ce bien-être fait peut-être de nous de faibles consommateurs ???). Sumatra, terre fertile, est couverte de volcans et de montagnes qui renferment de magnifiques lacs, des cascades, des sources d'eaux chaudes sulfurées sorties tout droit des entrailles de la terre. Nous croisons des villes, grouillantes et fiévreuses qui baignent dans un ballet incessant de motos bruyantes et de gens affairés, le tout dans un rytme effréné - des endroits où les gens vivent à l'extérieur. Et puis parfois ce sont des villages où il semble que le temps se soit arrêté. Il y règne une atmosphère très douce ou chaque chose a sa place, ou chacun vaque à ses occupations.
Nous avons décidé d'emprunter la voie classique Medan-Bukkitingi-Prapang mais nous n'y avons finalement croisé que peu de touristes. Ceci ajoute d'ailleurs au charme de l'île. Les tremblements de terre, les tsunami et les attentats de Bali ont eu raison des touristes qui venaient naguère en nombre à Sumatra. Des vestiges du tourisme triomphant subsistent par ci par là : des hôtels défraichis, abandonnés, des magasins d'artisanat (batik, sculpture sur bois et autres peintures) vides. Heureusement, les habitants ont su rebondir et vivent désormais de la culture de riz, du caoutchouc, de cannelle, d'huile de palme, de café et bien d'autres. Nous ne sommes plus leur gagne pain et c'est pas plus mal, les rapports sont plus sains. Nous avons tout de même croisé quelques voyageurs comme cet irlandais, la quarantaine passée, tres bavard mais bien drôle qui est parti depuis Istanbul, a traversé l'Iran puis le Pakistan et compte se rendre ainsi jusqu'en Australie sans jamais prendre l'avion... ou cet anglais, ancien croupier dans les casinos des Caraïbes, la cinquantaine, fraichement converti à l'Islam chiite, qui a passé des semaines dans les madrasas au Yémen et en Malaisie. Il pratique un Islam mystique (soufisme) et il médite souvent. Bref de ces voyageurs qui vous font voyager par les récits et autres anecdotes de voyage qu'ils vous content le soir une fois le soleil couché, ça nous fait partir un peu plus loin encore...
Bien à vous.
5 commentaires:
Bion alors Yves racontes nous Sumatra :-())) tu nous tiens en haleine !!!
Sumatra ! Sulmatra !
Yeah man,
eh ben je dois dire que j'ai été médisant à propos de ton écriture... je me suis pris à m'imaginer la bas le temps de lire ton post !
Sumatra a donc l'air bien cool... et surtout accueillant et apaisant d'après ce que j'ai compris.
Ecris nous une bafouille plus souvent ...
PS : je vois pas ce que tu as contre le club med...
que du bonheur , vous nous faites rêver , je me suis imaginée l'espace de ma lecture devant un rizière verdoyante !!! trop bien
encore
gros bisous
Salut les voyageurs
Je me disais bien que ca valait le coup cette île de Sumatra, merci pour ton post Yves. Je vous envie, surtout pour l'état d'esprit dans lequel vous semblez être. Voila des propos qui me vont droit au coeur! Quel moments que ceux où l'on donne un nouveau sens à nos agitations. Ah vraiment c'est dur d'entendre ca et de rester à Paris. Heureusement que je pars en Inde après demain ;)YES!!
Je vous embrasse
Très heureuse vraiment d'apprendre que l'on peut toujours voyager sur cette planète!
De l"égo? Penser à tous ceux qui n'en voient pas "l"intéret".
Et dans la nuit qui s"étend,je parle de Sumatra au char.Sylvaine
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